Bail Professionnel vs Bail Commercial : Guide Pratique pour le Kinésithérapeute
Le choix du type de bail pour l’installation de votre cabinet est une décision stratégique aux conséquences juridiques et financières importantes. Alors que la loi permet parfois aux professions libérales réglementées de contractualiser un bail commercial, le CDOMK13 recommande vivement aux praticiens d’opter pour un bail professionnel, jugé bien plus protecteur. Cet article détaille les raisons de cette recommandation et les points de vigilance.
- Les Mentions Obligatoires du Bail
Que vous choisissiez un bail professionnel ou commercial, certaines mentions sont indispensables pour sécuriser votre contrat. Assurez-vous qu’elles y figurent clairement :
- La destination des locaux : Elle doit être explicitement précisée comme « exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute » ou « usage de cabinet de kinésithérapie ».
- La description détaillée des locaux :
- Le nombre de pièces/salles de soin.
- La surface en mètres carrés (surface utile et surface Carrez).
- L’accessibilité aux personnes à mobilité réduite (PMR), si applicable.
- Les équipements inclus (sanitaires, vestiaire, etc.).
- Quel bail est Recommandé
Le CDOMK13 déconseille le bail commercial pour l’exercice de la kinésithérapie et préconise le bail professionnel pour trois raisons majeures.
Souplesse de Résiliation
C’est la différence fondamentale. Le bail professionnel offre une liberté bien plus grande pour mettre fin au contrat.
- Bail professionnel : Vous pouvez donner congé à tout moment par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR), en respectant un préavis de 6 mois. La date de fin de bail sera le dernier jour du trimestre civil suivant l’expiration de ce préavis.
- Bail commercial : La résiliation n’est possible qu’à la fin de chaque période triennale (à l’issue de 3, 6, 9 ans…). Le congé doit être donné pour le dernier jour du trimestre civil et au moins six mois à l’avance. Cette rigidité peut être très contraignante en cas de projet de déménagement, de cessation d’activité ou de difficultés.
- Exemple concret : Si vous envoyez votre préavis le 4 avril 2026, le délai de 6 mois court jusqu’au 4 octobre 2026. Il faut ensuite ajouter le délai pour atteindre la fin du trimestre civil. Votre bail prendra donc fin le 31 décembre 2026.
Révision du Loyer Plus Prédictible et Protectrice
- Bail professionnel : Le loyer est généralement révisé annuellement selon un indice de référence (comme l’IRL), ce qui permet de maîtriser l’évolution des charges.
- Bail commercial : Lors du renouvellement du bail (tous les 9 ans), le loyer est réévalué en fonction de la valeur locative de marché de locaux similaires. Il n’existe pas de plafond strict (comme le +10% applicable aux baux d’habitation), ce qui peut entraîner des hausses de loyer très importantes et imprévisibles.
- La Clause de Sous-Location
Les baux commerciaux contiennent souvent des clauses interdisant ou restreignant fortement la possibilité de sous-louer. Sans l’accord exprès du propriétaire (bailleur), cette clause pourrait vous empêcher de travailler ultérieurement avec un assistant ou un collaborateur dans vos locaux, limitant ainsi votre capacité à développer votre activité.
- Le Bail Professionnel
Définition et Durée
- Le bail professionnel concerne l’exercice d’une profession libérale (réglementée ou non). Il est donc parfaitement adapté aux kinésithérapeutes.
- Sa durée est fixée par la loi à 6 ans minimum. À son terme, il se reconduit tacitement pour une nouvelle durée de 6 ans, sauf résiliation de l’une des parties dans les règles énoncées ci-dessus.
Cas Particulier du Bail Mixte (Exercice à Domicile)
Lorsque le kinésithérapeute exerce partiellement ou exclusivement à son domicile, il relève du bail mixte (usage d’habitation + usage professionnel).
- Régime applicable : Il est soumis aux règles du bail d’habitation. Consuleter la mairie pour le changement de destination des locaux.
- Durée :
- 3 ans si le propriétaire est une personne physique.
- 6 ans si le propriétaire est une personne morale (société, SCI…).
- Sous-location et cession : Ces deux actions sont strictement interdites dans le cadre d’un bail mixte.
- Points de Vigilance Importants
Normes ERP (Établissement Recevant du Public)
- Pour tout nouveau cabinet : Le respect des normes ERP (accessibilité, sécurité incendie) est obligatoire. Le non-respect peut engager votre responsabilité déontologique et civile vis-à-vis de vos patients.
- Exception pour l’exercice à domicile : Si les locaux sont utilisés pour la vie familiale, ils sont juridiquement considérés comme des bâtiments d’habitation (sauf si déjà classés ERP). Concrètement :
- Si l’entrée et les cheminements sont communs (partie habitation et cabinet), la mise aux normes ERP n’est pas obligatoire.
- Si l’entrée et les cheminements sont séparés, la partie professionnelle est considérée comme un ERP et doit être aux normes.
Sous-Location et Cession du Bail
- En bail professionnel « classique » (hors domicile) :
- Sous-location : Elle est autorisée (sauf clause contraire du bail). Elle doit être mentionnée en cas de contrat d’assistanat ou de collaboration. Vous demeurez responsable vis-à-vis du propriétaire.
- Cession du bail : Vous pouvez céder librement votre bail à un successeur (ex. : lors de la vente de votre fonds), sauf si le contrat l’interdit.
Les Recommandation de l’Ordre
Pour protéger votre exercice professionnel, il est crucial de choisir le bon cadre juridique. Pour un kinésithérapeute, le bail professionnel est nettement préférable au bail commercial en raison de sa souplesse de résiliation, de sa maîtrise de l’évolution des loyers et de ses conditions plus favorables pour la collaboration.
En résumé :
- Privilégiez le bail professionnel.
- Faites figurer toutes les mentions obligatoires (destination, description des locaux).
- Soyez vigilant sur les clauses de sous-location et de cession.
- Anticipez les normes ERP pour tout local dédié exclusivement à l’activité.
- Dans le doute, consultez un professionnel du droit (avocat, notaire) ou votre conseil ordinal.
Enfin, tout contrat de bail doit permettre d’accueillir les patients dans des conditions convenables et être en parfaite conformité avec les règles déontologiques de la profession.